mardi 24 mai 2011

Robert Altman. Une biographie orale


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This review is from : Robert Altman. Une biographie orale
Bob le flambeur : une vie en 3 actes et 145 voix .

Alors qu'il préparait les mémoires de Robert Altman, qui devaient essentiellement porter sur le rapport d'Altman à sa création, la mort du cinéaste fin 2006 poussa Mitchell Zuckoff à changer son fusil d'épaule. Plutt que de suivre le souhait d'Altman et de ne pas trop consacrer d'espace à la vie de l'homme, Zuckoff a souhaité éclairer tout autant le tempérament et les contradictions d'Altman que les circonstances de la création de son oeuvre, sa réception, et plus largement son évolution et sa place à part dans le système hollywoodien. La très bonne idée est d'avoir choisi la forme de la biographie orale, mosaque de voix se répondant et se complétant, voire se chevauchant - mimant ainsi le fameux "overlapping dialogue" des films d'Altman, qui faisait parler ses acteurs en mme temps et les dialogues se chevaucher sur la bande-son. Au nombre de 145 apparemment, ces voix finissent par brosser un portrait particulièrement enlevé de la faon assez libre dont Altman vivait son rapport aux autres et la création comme processus collectif (dans lequel il ne fait aucun doute toutefois qu'il était la pièce centrale, ce dont tous les autres devaient convenir s'ils souhaitaient ne pas figurer sur sa liste noire).Précisons tout de suite : si l'on ne s'intéresse aucunement à la personne derrière les oeuvres, et si l'on est anglophone, on aura tout intért à se porter sur Altman on Altman, dialogues approfondis avec Altman sur sa création. N'étant pas fou de biographies moi-mme, je dois néanmoins reconnatre que j'ai trouvé ce livre particulièrement réussi. Cela a bien entendu tout à voir avec son sujet, la forme choisie étant fort adéquate pour rendre compte de la création de ce "maverick" (terme utilisé aux Etats-Unis pour les btes sortant du troupeau, utilisé par extension pour les personnalités indépendantes, voire rebelles).Le livre est divisé en trois actes : de sa naissance à Kansas City en 1925 à 1969 ; les années 70, soit celles de l'apogée de son talent, en tout cas des occasions qui lui sont données après M*A*S*H d'en faire état au sein du système de production majoritaire ; de sa traversée du désert des années 80 au renouveau créatif des années 90 à sa mort en 2006.Dès les premiers chapitres, tout est bien situé, pour ce qui est de son tempérament bien sr, mais aussi de son mode de vie et de ses méthodes de travail. Pilote de bombardier à peine sorti de l'adolescence, ayant participé à une cinquantaine de missions dans le Pacifique vers la fin de la 2ème Guerre mondiale, il lui faudra plus d'une vingtaine d'années pour arriver à se faire reconnatre comme réalisateur. Zuckoff retrace toutes les étapes également, sans oublier de montrer, grce à des témoignages variés, comment Altman a très vite été respecté par ses acteurs et certains de ses commanditaires, d'abord comme réalisateur de films industriels puis d'épisodes de séries télévisées. Comment il était clair aux yeux de tous qu'il était à la fois brillant - voire qu'il était un aimant pour un entourage assez large - dirigeait ses acteurs de faon à ce qu'ils se sentent en confiance et puissent faire preuve d'une liberté qu'ils n'avaient pas forcément ailleurs, mais aussi qu'il était capable de foucades et de colères dantesques, et pouvait tre à la limite de l'incontrlable. Le récit des frasques d'un homme à femmes qui est aussi un joueur, dont chaque nouvelle épouse ctoie la nouvelle arrivée, pour qui les enfants ne sont certes pas une priorité, ftard amateur de boissons fortes et de joints qui tour à tour flambe et mange de la vache enragée, se double de celui d'un créateur sr de son talent, en qui de nombreuses personnes ont confiance et qui pourtant n'arrive jamais vraiment à développer son potentiel.Ce n'est donc qu'à 44 ans qu'Altman accède à la notoriété, grce à ce film irrévérencieux entre tous, M*A*S*H, qui arrive à la bonne heure (1970). Sa carrière est loin de débuter, mais elle est enfin sur les rails avec ce succès public et critique international (Palme d'Or à Cannes). La suite - les années 70 - est une série de déceptions pour Altman, commercialement s'entend, mais aussi celle où sa liberté est au moins en partie en phase avec le renouveau de la création et l'avènement d'une nouvelle génération de cinéastes (ce que l'on a appelé le "Nouvel Hollywood"). Bon an, mal an, il aligne des projets éminemment personnels, et s'assure un contrle plus poussé en créant sa propre maison de production. Mais les bides des années 70 ne sont rien à cté de ce qui l'attend dans les années 80, où le changement d'esprit et la reprise en mains des studios aboutissent presque à le rayer purement et simplement des cinéastes susceptibles de travailler au sein des studios. Le récit de la liberté qu'il contribue à faire souffler dans le cinéma américain des années 70, et des déconvenues qu'il ne cesse de rencontrer, est en tout point passionnant. En revanche, on ne peut pas dire que Zuckoff consacre toujours assez de place à certains films (de leur conception à leur réception) et certains chapitres semblent se contenter d'un survol - à sa décharge, on peut dire que le livre dépasse déjà les 500 pages, et qu'il ne voulait sans doute pas faire un compte rendu exhaustif de la fabrication de chaque film, surtout pour un auteur aussi prolifique. On aurait pourtant aimé en savoir plus sur des films aussi singuliers que Brewster McCloud ou Trois femmes, ou les films de la toute fin des années 70 par exemple. Finalement, avec l'aide de nombre de ses collaborateurs et acteurs, Zuckoff rend bien compte du "come-back" d'Altman dans les années 90, avec The Player et Short Cuts et de la maturité stylistique de ses derniers films, jusques et y compris The Last Show - Altman lui-mme était passablement irrité que son retour en grce soit présenté comme un come-back, lui qui avait toujours continué à travailler contre vents et marées.Altman lui-mme, ses proches et ses collaborateurs, ceux qui ont eu à faire avec lui à tel ou tel moment, tous interviennent pour éclairer ce parcours. Il faut ajouter que Zuckoff fait entrer dans son concert de voix celles de certaines critiques, qui sont chargées de résumer la réception des films au moment de leur sortie. Sa nature de patchwork, ainsi que les inévitables répétitions et remarques de moindre intért de certains intervenants, n'empchent aucunement cet ouvrage de passionner. Pris globalement, il s'agit du portrait attachant d'un homme farouchement indépendant dont l'esprit de compétition n'avait d'égal que le souverain mépris des règles à suivre esthétiquement ou commercialement. Dans le détail, on apprend des anecdotes croustillantes, sur l'homme, sur ses films, sur l'esprit d'une époque telle qu'elle a pu tre assez libre pour laisser le choix à ceux qui ont bien voulu le faire. Y compris celui de se saborder, d'ailleurs. Dans sa vie comme dans ses relations de travail, Bob était bel et bien un flambeur, prt à remettre en question son capital en quelques claquements de doigts. Sans tout trouver - dans l'oeuvre comme dans le comportement de l'homme - admirable, tant s'en faut, il est difficile de ne pas avoir de l'admiration pour un tel risque-tout. On a pu reprocher à Altman d'avoir gaspillé son talent, d'avoir transformé une véritable liberté de manufacture en paresse. Cela a sans doute été le cas à plusieurs reprises, mais outre que nombre de ses films mériteraient qu'on les regarde d'un peu plus près à présent qu'ils sont dégagés du moment de leur confection, il reste évident que la contrepartie de la liberté qu'Altman prenait et qui donnait des résultats souvent exceptionnels, dans la forme que prenaient ses films autant que dans certains de leurs moments, était bien des passages plus relchés, voire paresseux. Ce qu'il y a de très beau dans certains de ses derniers films, par exemple Cookie's Fortune ou The Last Show, c'est précisément qu'ils portent en eux une nostalgie pour un mode de vie simple et décomplexé particulièrement en phase avec le relchement de sa mise en scène. Qui trouvait là, ainsi que dans le formidable Gosford Park, une manière d'aboutissement.L'édition américaine, sortie en grand format en 2009, est en poche de tout à fait bonne qualité pour la qualité du papier et des reproductions : Robert Altman: An Oral Biography. L'édition franaise, parue fin 2011 chez G3J, est quant à elle d'un format plus grand, et plus épaisse, mme si elle comporte grosso modo le mme nombre de pages. Là aussi, la qualité des reproductions est bonne. La traduction, de plutt bon aloi, laisse tout de mme passer des calques assez malvenus. A la traduction de l'édition américaine vient s'ajouter une préface de Samuel Blumenfeld, qui re-situe bien le personnage et son cinéma avant de laisser la parole aux intervenants sollicités par Zuckoff.Au total, un excellent compagnon des films d'Altman, qu'on choisisse si on le peut d'aller les revoir pendant la rétrospective que lui consacre la Cinémathèque franaise jusqu'en mars 2012, ou de les (re)voir en dvd pour ceux qui ont fait l'objet d'une édition en France. Tous ses films majeurs ne sont pas encore édités : il est plus que temps que cela soit le cas.Si l'on s'intéresse avant tout aux films, on peut également se procurer en occasion le Robert Altman de Jean-Loup Bourget (dont la 2ème édition s'arrte hélas à Short Cuts et ne couvre pas les dix dernières années de sa carrière).


Product Details

EAN : 9782952798365
Weight : 3 pounds
Height : 2 inches
Length : 10 inches
Width : 8 inches
Author : Mitchell Zuckoff
Binding : Broché
Manufacturer : G3J éditeur
PublicationDate : 2011-11-25
Publisher : G3J éditeur
Studio : G3J éditeur

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